Mesurer l’ efficacité de la remédiation cognitive- Pascal Vianin

Vidéo de la présentation de Pascal Vianin « Programme Recos derniers développements, nouvelles indications » ou comment mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive. Captation réalisée lors de la 8ème Journée du C3RP, le 28 juin 2019.

 

C3RP : Centre Ressource-Remédiation Cognitive et Réhabilitation Psychosociale, Île-de-France

Paris 28 juin 2019

(1) Programme Recos derniers développements, nouvelles indications

Pascal Vianin

Centre hospitalier universitaire vaudois
Centre hospitalier universitaire vaudois
CNTP - Centre de neuroréhabilitation pour troubles psychiques - évaluation et remédiation cognitive
CNTP – évaluation et remédiation cognitive
UNIL | Université de Lausanne
UNIL université de Lausanne

(2) Plan de la présentation
  1. Remédiation cognitive et rétablissement
  2. L’efficacité de la remédiation cognitive : ce que disent les méta-analyses
  3. Du bilan neurocognitif à la définition d’objectifs
  4. L’impact des processus métacognitifs sur les variables fonctionnelles
  5. Evaluer l’efficacité de la remédiation cognitive : un changement de paradigme
  6. Conclusion

(3) Remédiation cognitive et rétablissement


(4) Qu’est-ce que le rétablissement ?

  • Le rétablissement est le processus par lequel les gens sont capables de vivre, de travailler et de participer pleinement à la vie en communauté.
  • Il base son action sur la récupération de fonctions qui
    permettent la vie la plus autonome possible dans l’environnement le plus naturel possible, malgré l’existence de symptômes résiduels.
  • Le rétablissement ne correspond pas à la notion médicale de guérison.

(5) Le service de psychiatrie communautaire de Lausanne

  • Mission : quitter les lieux protégés pour s’engager sur des suivis individualisés dans la communauté à modèle du rétablissement
  • Plusieurs projets dans l’unité en lien avec la connexion à l’environnement
    • Soutien à l’emploi (IPS « place then train »)
    • Ergothérapie à domicile
    • Collaboration avec les familles et pairs aidants
    • Housing first
    • Remédiation cognitive

(6) L’efficacité de la remédiation cognitive

Ce que disent les méta-analyses …


Wykes et al., 2011

(7) Les mesures considérées pour évaluer l’efficacité de la remédiation cognitive

Mesures d’efficacité de la remédiation cognitive

Mesures d'efficacité de la remédiation cognitive
Mesures d’efficacité de la remédiation cognitive

(8)Mesures des tailles d’effet

Sur un nombre de total de 2104 participants, la remédiation cognitive n’obtient qu’un effet thérapeutique modéré sur le plan de la cognition et sur celui des variables fonctionnelles.

Mesures des tailles d’effet de la remédiation cognitive
Mesures des tailles d’effet de la remédiation cognitive

(9) Les variables fonctionnelles mesurées

  • Au terme de leur participation aux programmes de remédiation cognitive, les personnes souffrant de schizophrénie …
  • Sont plus enclins à obtenir un emploi compétitif;
  • Développent des relations interpersonnelles plus satisfaisantes;
  • Parviennent à résoudre plus facilement les problèmes avec leur entourage;
  • Vivent de manière plus autonome;
  • Gagnent mieux leur vie.

(10) Le modèle « classique »

Le modèle « classique » efficacité de la remédiation cognitive
Le modèle « classique »
Evaluation neurocognitive – Remédiation cognitive – Réévaluation cognitive. Bénéfices fonctionnels

(11) Une remédiation cognitive « fonctionnelle »

Une remédiation cognitive « fonctionnelle »
Une remédiation cognitive « fonctionnelle »

(12) Evaluation initiale

Du bilan neurocognitif à la définition d’objectifs individualisés


(13) La validité écologique des tests neurocognitifs


(14) Problème de planification ?

Problème de planification ?
Problème de planification ?

(15) Représentativité et généralisabilité

  • La validité écologique définit le niveau de correspondance entre les résultats obtenus dans une condition expérimentale et ceux obtenus dans une condition naturelle.
  • Elle comprend deux aspects :
    • La représentativité fait référence à la condition naturelle ou artificielle d’une situation expérimentale.
    • La généralisabilité décrit dans quelle mesure les résultats obtenus lors des tests sont susceptibles d’expliquer un processus similaire dans la vie quotidienne.

(16) Tests à visée diagnostique

  • Lorsqu’il s’agit d’identifier un trouble cognitif consécutif à une lésion cérébrale, il est souhaité de contrôler les variables parasites qui ne concernent pas la fonction concernée.
  • La majorité des tests d’évaluation neuropsychologique ont une visée diagnostique et souffrent d’une mauvaise validité écologique.
  • Un effort doit être entrepris pour proposer des tests neurocognitifs contextualisés et plus proches des contraintes rencontrées dans l’environnement quotidien.

 (17) Behavioural Assessment of the Dysexecutive Syndrome (BADS)

  • La batterie BADS a été développée pour mesurer les fonctions exécutives dans un contexte écologique.
  • Elle comprend les 6 sous-tests suivants :
    1. Cartes d’alternance de règles → Flexibilité cognitive
    2. Programme d’actions → Résolution de problème
    3. Recherche des clés → Organisation spatiale
    4. Jugement temporel → Estimation de durées
    5. Carte du Zoo → Planification
    6. Test modifié des 6 éléments → Gestion du temps

(18-19) Test des Commissions révisé (Fournet et al., 2015)

Test des Commissions révisé (Fournet et al., 2015)  - efficacité de la remédiation cognitive
Test des Commissions révisé (Fournet et al., 2015)
Test des Commissions révisé (Fournet et al., 2015)
Test des Commissions révisé (Fournet et al., 2015)

(20) ERF – L’échelle d’évaluation des répercussions fonctionnelles


(21) Importance des répercussions fonctionnelles

  • La relation entre déficits cognitifs et répercussions fonctionnelles est fondamentale dans toute démarche de réhabilitation.
  • Le choix des tests cognitifs devrait tenir compte des répercussions fonctionnelles qui leur sont associées.
  • Peu d’efforts ont été faits jusqu’ici pour étudier les liens entre troubles cognitifs et répercussions fonctionnelles.

(22) Echelle des Répercussions Fonctionnelles (ERF)

  • Il s’agit d’un questionnaire semi-structuré spécialement conçu pour le programme RECOS.
  • L’ERF fait le lien entre le bilan cognitif et les répercussions fonctionnelles observées dans la vie quotidienne.
  • Elle permet de définir des objectifs de traitement individualisés.

(23) Passation et objectifs de l’ERF

  • Items servant de point d’ancrage pour aborder les différents thèmes liés au fonctionnement
  • Questions ouvertes
  • Demander des exemples
  • Evaluation proche de l’analyse fonctionnelle
    • Comme cela se passe-t-il ?
    • A quelle fréquence ?
    • Dans quel contexte ?
  • Fixer les objectifs de traitement

(24) Analyse de l’impact des déficits cognitifs en emploi (IDCE)

Dix domaines liés au fonctionnement professionnel sont évalués par l’employeur et/ou par le psychologue chargé d’observer l’employé sur son lieu de travail :

  1. Rendement
  2. Organisation et planification
  3. .Capacité d’action
  4. Attention/concentration
  5. Mémoire
  6. .Apprentissage
  7. Gestion du temps
  8. Langage et communication
  9. Interactions sociales
  10. .Auto-évaluation

(25) Définir des objectifs fonctionnels et  individualisés


(26) Capacités ou compétences fonctionnelles ?

Medalia et Saperstein (2013)

Compétences

Ensemble des activités du sujet dans la vie réelle

Capacités

Performances dans des situations  spécifiques et contrôlées

  • Avoir un bon rendement sur le plan professionnel
  • Avoir des loisirs
  • Avoir une vie sociale épanouie
  • Gérer son logement de manière autonome
  • Faire ses courses
  • Préparer le repas
  • Se déplacer de manière autonome
  • Arriver à l’heure à ses rendez-vous
  • Trier son courrier
  • Payer ses factures

La valeur prédictive de l’évaluation neurocognitive sur la résultante fonctionnelle augmente lorsqu’on mesure les capacités plutôt que les compétences.


(27) But de la remédiation cognitive : améliorer les capacités fonctionnelles

But de la remédiation cognitive : améliorer les capacités fonctionnelles
But de la remédiation cognitive : améliorer les capacités fonctionnelles

(28) Caractéristiques des objectifs

  • Concrets et opérationnels
  • Réalisables
  • Personnalisés
  • Visent à améliorer la qualité de vie

Ces objectifs sont fréquemment en lien avec l’emploi (présent ou futur).


(29) Entraîner les processus métacognitifs


(30) Lien entre les fonctions cognitives et les répercussions fonctionnelles

Lien entre les fonctions cognitives et les répercussions fonctionnelles
Lien entre les fonctions cognitives et les répercussions fonctionnelles

(31) Les trois types de méta-connaissances

  1. Les connaissances métacognitives définissent ce que le patient comprend au sujet de ses capacités cognitives et de ses difficultés (insight cognitif).
  2. Les connaissances procédurales concernent la manière d’effectuer une tâche. Prendre conscience de ces procédures est essentiel pour la remédiation cognitive.
  3. Les connaissances conditionnelles permettent de répondre aux questions « quand, où et pourquoi » solliciter telle ou telle compétence.

(32) Evaluer l’efficacité des programmes de remédiation cognitive autrement


(33) La remédiation cognitive est-elle efficace ?

  • 38 études montrent un effet cognitif global « modeste » (taille d’effet : 0,45).
  • Les résultats obtenus sur les variables fonctionnelles sont peu homogènes et concernent davantage les compétences que les capacités fonctionnelles.

Comment mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive ?


(34) But : améliorer les capacités fonctionnelles
(objectifs individualisés)

But : améliorer les capacités fonctionnelles  (objectifs individualisés)
But : améliorer les capacités fonctionnelles (objectifs individualisés)

(35) Echelle de réhabilitation cognitive – ERC
(Vianin et al., 2019)

Cette échelle évalue les progrès du participant avant et après le programme de remédiation cognitive selon 4 dimensions propres au concept de rétablissement :

Echelle de réhabilitation cognitive - ERC - efficacité de la remédiation cognitive
Echelle de réhabilitation cognitive – ERC

(36) ERC – mode de passation

  • L’échelle d’évaluation varie de 1 à 6;
  • Elle est remplie avant et après un programme de remédiation cognitive par un clinicien fréquemment en contact avec le participant:
  • L’évaluateur n’est pas impliqué dans le travail de remédiation cognitive avec la personne évaluée;
  • Quand il y a un doute par rapport à deux notes adjacentes, attribuer le degré le plus faible.

(37-44)

1. Echelle d’auto-évaluation et d’insight

La note doit donc refléter sa capacité à évaluer ses ressources et ses difficultés cognitives actuelles et leur impact sur son fonctionnement.

1. Echelle d’auto-évaluation et d’insight - mesurer l'efficacité de la remédiation cognitive
1. Echelle d’auto-évaluation et d’insight

2. Echelle d’adaptabilité/contrôle

La note doit donc refléter sa capacité à adapter son comportement en fonction de ses troubles cognitifs, et également des ressources dont il dispose.

2. Echelle d’adaptabilité/contrôle
2. Echelle d’adaptabilité/contrôle

3. Echelle d’activité/inactivité (non professionnelle)

La note attribuée doit refléter la somme d’activités productives et ayant un but précis.

3. Echelle d’activité/inactivité (non professionnelle)
3. Echelle d’activité/inactivité (non professionnelle)

4. Echelle d’activité professionnelle

La note doit onc refléter sa capacité à accomplir des activités professionnelles, et son degré d’autonomie sur le plan de l’emploi.

4. Echelle d’activité professionnelle
4. Echelle d’activité professionnelle

5. Echelle d’intégration/isolement social

La note doit refléter la fréquence des contacts avec un nombre varié de personnes et l’aptitude démontrée dans les rapports sociaux.

Echelle d'intégration/isolement social
Echelle d’intégration/isolement social

6. Echelle d’indépendance

La note doit refléter le degré d’autonomie et la quantité d’aide fournie exprimée à la fois en termes de fréquence et en termes de services.

Echelle d’indépendance - Mesurer l'efficacité de la remédiation cognitive
6. Echelle d’indépendance

7. Echelle sur le pouvoir d’agir

La note doit refléter dans quelle mesure le patient est capable de prendre des décisions et de prendre des initiatives. Elle reflète également le sentiment d’avoir le contrôle de sa vie et de pouvoir la diriger de manière sereine

7. Echelle sur le pouvoir d’agir - Mesurer l'efficacité de la remédiation cognitive
7. Echelle sur le pouvoir d’agir

8. Échelle des effets des symptômes actuels

La note doit refléter l’impact des symptômes sur le fonctionnement quotidien du patient.

8. Échelle des effets des symptômes actuels - Mesurer l'efficacité de la remédiation cognitive
8. Échelle des effets des symptômes actuels

(45) Mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive

Mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive
Mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive

(46) Conclusion


(47) La remédiation cognitive, un outil pour le rétablissement

  • L’amélioration des capacités neurocognitives, si elle ne s’accompagne pas de progrès sur le plan fonctionnel, ne présente aucun intérêt thérapeutique.
  • Le processus de rétablissement nécessite la définition d’objectifs fonctionnels, opérationnels et individualisés, le plus souvent en lien avec la vie en communauté.
  • L’amélioration des compétences métacognitives est associée aux progrès fonctionnels.
  • L’échelle ERC vise à mesurer l’effet de la remédiation sur le processus du rétablissement.

lampadaire la nuit
Quelqu’un cherche ses clés sous un lampadaire. Question : pourquoi sous un lampadaire ? Réponse : pas parce qu’il les a perdues là, mais parce que c’est le seul endroit éclairé de la rue.

Vianin, P. Bouttier, T., Fankhauser, C., Hausmann, P., Bonsack, C. (in Press) Comment mesurer l’efficacité de la remédiation cognitive ? Annales médico-psychologiques.


Visionnez les autres vidéos de la huitième journée du C3RP :

La réhabilitation, changement de paradigme – Journée C3RP 2019